Ce blog a pour but de vous proposer ponctuellement des traductions d'ouvrages généralement réalisées par moi-même (D&D et AD&D 1ère édition, mais également des livrets de règles de jeux de plateaux ainsi qu'éventuellement d'autres jeux de rôle datant de la même époque) ou parfois par d'autres personnes; je vous présenterai aussi des photos de certaines de mes réalisations personnelles :)
18 Mai 2020
Après avoir décortiqué le sort sommeil (article à lire ICI), je vais maintenant m'attaquer à un autre sort de premier niveau très apprécié des magiciens : le sort charme-personnes (charm person en version originale).
Alors ce sort est assez particulier car il peut s'avérer aussi bien puissant que faible... tout dépend de la "personne" que vous charmez ; en effet, avoir un kobold (avec ses 1-4 points de vie et sa force lilliputienne) à son service ne sera pas aussi efficace et "rentable" qu'un hobgobelin ou, encore mieux, un guerrier du 10e niveau !
Et oui, ce sort agit sur un type de créature (humanoïde de la taille d'un humain), pas sur son niveau ; dans le cas d'un humain par exemple, il fonctionnera donc de la même manière sur un personnage de niveau 1 que de niveau 20 (sauf dans la version Mentzer)... la seule différence étant qu'un personnage de niveau 20 aura de bien meilleurs jets de protection qu'un de niveau 1 et aura donc beaucoup moins de risques d'être charmé... mais quand même, on n'est jamais à l'abri d'un "fumble" ^^.
Ce sort ne subira pas de gros changements tout au long des différentes éditions, mais certains détails font la différence d'une version à une autre. Mais commençons par le début.
OD&D : la toute première mouture de ce sort est assez simpliste dans sa description. On y apprends que sa portée est de 36 m et qu'il peut s'utiliser sur toute créature bipède, généralement mammifère, de la taille d'un humain ou plus petit. Le sort ne fonctionne pas sur les morts-vivants. Vient ensuite une liste de quelques créatures pouvant être charmées : esprit follet, pixie, génie des eaux, kobold, gobelin, orque, hobgobelin et gnoll.
On nous dit ensuite que si le sort réussit (c'est à dire que la créature visée a raté son jet de protection contre les Sorts), alors la créature charmée est totalement sous l'influence du magicien et ceci jusqu'à ce que le sort soit annulé par un sort de dissipation de la magie... autant dire que la créature charmée risque de l'être à vie. Bon et puis "totalement sous l'influence du magicien", si on prend ça au pied de la lettre, alors la créature charmée obéit sans broncher aux ordres de son "maitre"... drôlement puissant quand même.
Le supplément "Greyhawk" (1975) apporte quelques précisions supplémentaires : dorénavant une créature charmée ne l'est plus indéfiniment ou jusqu'à ce qu'un sort de dissipation de la magie ne soit lancé. Maintenant elle peut relancer à intervalle régulier un jet de protection, la périodicité dépendant de son intelligence ; avec une intelligence de 6 ou moins, c'est une fois par mois, de 7 à 9 c'est une fois toutes les 3 semaines, 10 à 11 toutes les deux semaines, 12 à 15 une fois par semaine, 16 à 17 tous les deux jours et 18 ou plus une fois par jour. Si le jet de protection est réussi, la créature se libère de l'enchantement.
D&D Holmes : cette version reprends exactement la même description que celle de la version précédente + le supplément "Greyhawk". Le texte est quasiment identique mot pour mot.
D&D Moldvay : cette version apporte quelques changements par rapport aux précédentes et surtout beaucoup de clarifications. On nous dit maintenant que ce sort agit sur les humains et les créatures humanoïdes (fini les mammifères bipèdes ^^). Une nouvelle liste de créatures est aussi donnée : goblours, gnoll, gnome, gobelin, hobgobelin, kobold, homme-lézard (qui n'est pas un mammifère, d'où le changement de définition ^^), ogre, pixie et esprit follet. Mais attendez.... Ogre ?!?! Effectivement, la notion de "créature de taille humaine ou plus petite" a disparu de la description. On nous rajoute à la place la phrase suivante : "il n'affecte pas les morts-vivants (bon ça c'était déjà le cas précédemment) ni les créatures plus grandes qu'un ogre" (pour ceux qui espéraient charmer des géants, c'est pas encore pour cette fois-ci ^^). Et oui, maintenant on peut charmer un ogre, et là ça rend ce sort beaucoup plus intéressant ; un ogre, c'est très puissant (4+1 DV), ça a des jets de protection moyen et, surtout, c'est très bête (mais vraiment), donc si on réussit à le charmer, on s'assure ses services pour un moment.
D'ailleurs, des précisions sont enfin apportées quant à ce qu'un magicien peut attendre d'une créature qu'il a charmé. Pour commencer, la créature charmée considère le magicien comme son "meilleur ami" (les guillemets sont présents dans la version originale : its "best friend") et essaiera de le défendre contre toute menace, réelle ou imaginaire. Par contre, si le magicien veut donner des ordres à la créature, il doit parler sa langue (ou une langue qu'elle comprends) ; si c'est le cas, il pourra alors lui ordonner tout ce qu'il veut sauf si ça va à l'encontre des habitudes ou de la moralité de la créature qui dans ce cas pourra refuser ou rechigner. Tout ordre de se donner la mort sera également rejeté par la créature. La créature charmée a toujours la possibilité de relancer régulièrement un jet de protection en fonction de son intelligence, mais le nombre de catégories a été simplifié et ramené à 3 : intelligence basse (3 à 8) qui permet de relancer un jet de protection une fois par mois, intelligence moyenne (9 à 12) qui autorise un jet une fois par semaine, et enfin intelligence élevée (13 à 18) qui permet un jet par jour. Comme précédemment, un sort de dissipation de la magie annule toujours un sort de charme-personnes. La portée reste également la même que dans les versions précédentes, 36 mètres.
Donc comme on le voit, le sort a vu sa puissance un peu rehaussée (on peut maintenant charmer un ogre, mais aussi des créatures humanoïdes qui ne soient pas forcément des mammifères, ce qui ouvre de nombreuses possibilités) mais en contrepartie les jets de protections reviennent plus souvent dès qu'on a une intelligence moyenne et aussi le magicien ne peut plus ordonner à la créature charmée de faire tout ce qu'il veut.
D&D Mentzer : dans l'ensemble, cette version est identique à la version Moldvay, mais là encore de nombreuses précisions sont apportées. Pour les créatures affectées, on nous dit maintenant les humains, les demi-humains et certaines autres créatures, en précisant plus loin "toutes les créatures qui ressemblent de diverses façons à des humains". On nous précise que le sort n'agit pas sur les animaux, ni les créatures magiques (telles que les statues vivantes), ni les humanoïdes plus grand qu'un ogre. On nous apprends aussi que les "ordres" donnés par le magicien (à condition toujours qu'il parle un langage que la créature charmée comprends) devraient plus ressembler à des suggestions, comme ce serait le cas entre "amis". Un exemple dans ce sens est donné, permettant de mieux comprendre de quoi il retourne. Enfin on nous dit que si la créature charmée est attaquée par le magicien qui l'a charmé (que ce soit par sort ou par arme), l'enchantement est immédiatement rompu. Si elle est attaquée par les alliés du magicien, elle les combattra en retour.
Par contre certaines informations ne sont maintenant plus accessibles aux joueurs. En effet, cette version est scindée en deux livrets distincts : le Livret des joueurs et le Livret du MD. Du coup certaines informations pour ce sort ne sont données que dans le Livret du MD : il s'agit de la fréquence des jets de protection (qui reste en fait la même que celle donnée dans la version Moldvay) mais également les types exacts de monstres qui sont affectées par ce sort (car en effet les joueurs ne sont pas sensés le savoir et doivent ainsi apprendre à connaitre les créatures pouvant être affectées, ce qui parfois les fera lancer un charme-personnes sur une créature qui n'y est pas sensible, perdant alors leur sort) ; on nous redis donc que les animaux ne sont pas affectés (ça les joueurs le savent déjà), mais également les morts-vivants, les créatures fantastiques (telles les gargouilles, les méduses, etc.) ainsi que toute créature avec 6 ou plus DV (et oui, terminée la possibilité de charmer des personnages de haut niveau). On nous apprends aussi que certains lycanthropes peuvent être charmés (les loups-garous et les sangliers-garous) mais seulement lorsqu'ils sont sous forme humaine et que l'enchantement sera rompu dès qu'ils se transformeront. On nous redonne ensuite la liste des créatures disponibles dans les règles de Base et qui peuvent être charmées (la même liste que dans la version Moldvay avec en plus les néanderthals). On nous dit que certaines créatures des règles Expert et Compagnon peuvent également être charmées et que la liste de ces créatures est donné dans chacun des livrets correspondants.
Bon et sinon la portée est toujours de 36 mètres, là dessus ils sont constants ^^.
Dans la dernière version de D&D (la version Brown), la description reste identique à celle de la version Mentzer, il y a juste un petit rajout concernant le cas où la créature charmée est attaquée par les alliés du magicien : la créature les combattra donc en retour mais on nous précise bien qu'elle reste charmée. C'était déjà implicitement le cas avant mais c'est quand même mieux quand c'est écrit noir sur blanc.
AD&D : la version AD&D est un mélange de tout ce qu'on trouve en D&D. Elle est très proche de la version Holmes pour ce qui est des créatures concernées : le magicien ne peut charmer que des humains ou des humanoïdes bipèdes de taille humaine ou plus petite ; la liste exacte des créatures est ensuite donnée : demi-elfe, demi-orque, elfe, esprit follet, génie des eaux, gnoll, gnome, gobelin, hobgobelin, homme-lézard, humain, kobold, lutin, nain, orque, petite-gens, pixie et troglodyte (cette liste ne mentionne en fait que des créatures que l'on trouve dans le Manuel des Monstres ; avec la sortie plus tard du Fiend Folio et du Manuel des Monstres 2, de nouvelles créatures devront être ajoutées par le MD). Tout comme dans la version Holmes ou Moldvay, on peut charmer un humain de n'importe quel niveau.
Ensuite, on trouve les informations communes à toutes les versions : la portée est de 36 m (quand je vous dis qu'ils ont été constant là-dessus ^^), un sort de dissipation de la magie annule l'enchantement et la créature charmée relance régulièrement un jet de protection suivant son degré d'intelligence... mais ici la plage des fréquences a été élargie : ça va d'un jet de protection une fois tous les 3 mois pour les plus bêtes (intelligence 0 à 3) jusqu'à une fois par jour pour les créatures les plus intelligentes (19 et au-delà), avec entre ces deux extrêmes 7 autres plages. Autre nouveauté, on nous dit que si la créature est blessée par les alliés du magicien au moment où ce dernier lui lance un sort de charme-personnes, alors ladite créature bénéficiera d'un bonus à son jet de protection de +1 par point de dégât reçu.
Comme dans les versions Moldvay et ultérieures, si le magicien attaque la créature charmée, l'enchantement est automatiquement rompu. Le magicien doit parler une langue que la créature charmée comprend pour pouvoir lui donner des ordres ; là aussi ces ordres doivent plutôt se faire sous forme de suggestions. Le sort ne permet pas au magicien de contrôler la créature comme si elle était un automate. Une créature charmée refusera de se suicider mais pourrait croire le magicien si celui-ci lui disait que le seul moyen de lui sauver la vie est d'affronter le dragon rouge qui attaque.
La version AD&D restera absolument identique dans les versions suivantes AD&D2 et AD&D2 Révisée (seuls seront rajoutés quelques précisions sur certains points) à UNE exception près : la portée passe maintenant à 120 yards, soit environ 110 mètres !!! Mince alors, ils avaient pourtant été tellement constants jusque là ^^.
Voilà, sur ce je vous souhaite une excellente semaine et vous dis à bientôt sur la Forge de Papier.